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Faire des savons est en soi peu compliqué. Les colorer selon ses souhaits l’est un peu plus.. En effet la soude joue souvent des tours ! Plus ou moins heureux.. Entre les couleurs des matières 1ères (certaines HV sont très colorées naturellement) et les colorants que l’on ajoute, le résultat est parfois surprenant..
Nous allons voir les différentes possibilités pour colorer nos savons, grâce au livre de Susan Miller (The Soapmaker’s Companion), qui y fait un beau récap’. Mais avant de commencer, un point primordial: par pitié n’utilisez pas d’autres colorants que ceux certifiés « grade cosmétique » ! Bannissez les colorants pour bougies, les pigments pour peinture, pour céramique.. Ils contiennent des impuretés et peuvent être toxiques ! Les colorants certifiés « grade cosmétique » sont débarrassés de leurs impuretés (certains contiennent avant leur traitement des métaux lourds ! A éviter absolument !!) et approuvés pour un usage sur la peau. Méfiez vous aussi des colorants de certains vendeurs: qui ne précisent pas si leurs pigments sont naturels ou synthétiques, ou qui vendent des colorants étrangers, qui ont des restrictions d’usage (on peut lire « approuvé pour les yeux mais pas pour les lèvres » par ex.). Pour ma part, quand j’utilise un colorant, je le veux naturel et sûr.. Pour tous les usages ! Ceci étant dit, je vais tenter un tour d’horizon des différentes possibilités pour colorer nos savons.
Tout d’abord il faut distinguer 2 grandes familles de « colorants »: les pigments et les colorants (les anglais eux ont 2 mots.. Dye and pigments = colorants.. Nous n’en avons qu’un.. Dye se traduisant par colorant aussi..). Mais quelle est la différence ?
Les 1ers, les pigments, sont inertes: ils ne réagissent pas chimiquement, c’est à dire que leur composition ne change pas au contact de la matière qu’ils colorent. Ils se dispersent simplement dans la matière (ici dans la pâte à savons en l’occurrence) et captent puis reflètent la lumière. Les Ultramarines, les oxydes de fer, l’oxyde de zinc, certaines argiles..etc sont des pigments. Ils ne sont solubles ni dans l’eau, ni dans l’huile.
Contrairement aux « colorants« , qui eux sont solubles dans l’eau (ou dans l’huile). Eux réagissent chimiquement avec la matière qu’ils colorent et leur composition se modifie. Leurs molécules se « combinent » pour ne plus faire qu’une seule matière colorée. Il en résulte une couleur indélébile puisque « faisant partie » des molécules de la matière colorée.
Mais ça se complique quand on sait que les pigments et les colorants peuvent être naturels ou synthétiques.. Organiques ou d´origine minérale.. Par exemple les Ultramarines et les oxydes de fer peuvent être d’origine minérale ou synthétiques.. Difficile de s’y retrouver alors ! Pour être certaines de l’origine de vos pigments, posez des questions si vos vendeurs ne précisent pas si l’origine est naturelle ou synthétique..
Les pigments, qu’ils soient naturels ou synthétiques, ont l´énorme avantage d’être stables, puisqu’ils ne change pas de composition et ne sont que dispersés dans la matière qu’ils colorent. Peu de mauvaises surprises donc avec un oxyde ou une ultramarine ! Du moins si votre savon est blanc.. Car si une Ultramarine bleue est dispersée dans des HV jaunes, le bleu reflètera la lumière à travers le jaune et donc votre savon sera vert..
Mais le cas des colorants est encore bien plus compliqué.. Puisqu’eux changent carrément de composition ! Particulièrement les colorants naturels.. Très capricieux et qu’il faut amadouer ! Car même si vous lisez que la racine d’Orcanette colore en rose/violet, encore faut-il savoir la mettre en oeuvre.. Si vous la dispersez dans l’eau et la soude, vous serez déçue du résultat.. Alors qu´en faisant un macérât pour extraire son colorant dans vos huiles vous obtiendrez un beau mauve. Toujours avec la même racine, suivant le pH de votre savon la couleur peut être bleue (pH élevé) ou violet (avec un pH bas).. Des surprises plus ou moins heureuses vous attendent !
Car il faut aussi prendre en compte la couleur d’origine de vos matières 1ères (HV, actifs..) ET celle de leur réaction avec la soude ! Combien d’entre vous ont associé une belle infusion de plantes orange vif avec une HV de la même couleur et se sont retrouvées avec des savons marron/verdâtre/pas très joli ?..
En plus des données généralistes que l’on peut avoir (comme nous le verrons dans la seconde partie), il vous faudra faire vos propres tests, en mélangeant les colorants à vos autres ingrédients un à un, et en notant vos résultats. Car les possibilités sont infinies !
Si vous testez une nouvelle plante (et/ou épice, racine, écorce, algue..etc), Susan Miller conseille de faire 3 tests:
1/ En essayant de dissoudre le colorant en mettant la plante (de préf. en poudre) dans une mini solution soude/eau. Préparez la solution et mettez-y les plantes immédiatement, la chaleur de la réaction aidant le colorant à se solubiliser (ceci est aussi valable et recommandé pour les grosses quantités dans vos batch).
2/ En mélangeant la poudre de plante à une petite quantité d’HV. Faites chauffer votre mélange un peu pour accélérer le test.
Ces 2 premiers tests vous diront si votre colorant est hydrosoluble ou liposoluble. Il arrive quelques fois qu’il soit les 2. Ou pire aucun, comme l’Indigo ! Cela vous dira également avec quelle rapidité le colorant « passe » dans la solution (certaines plantes doivent macérer quelques heures, ou plusieurs jours dans une huile avant de la colorer).
3/ Utilisez la méthode la plus satisfaisante des 2 pour préparer une « solution colorée » (eau/soude ou huiles donc), de quoi faire un petit batch de savon. Vous couperez ce batch en 2: une moitié en le laissant tel quel pour voir le résultat, et la 2ème moitié en ajoutant le colorant aussi à la trace. Voir en plusieurs petits batch, pour tester l’ajout de plante en poudre, entière, et/ou sous forme concentrée (macérât chargé au maximum, poudre dissoute à saturation dans un peu d’eau..). Vous voyez qu’il y a un bon nombre de possibilités et de résultats différents pour une même et une seule plante !
Afin de réduire un peu vos tests, Susan nous donne quelques généralités sur les colorants naturels les plus connus. Même si encore une fois suivant les ingrédients de votre pâte à savons les résultats peuvent être surprenant.. Je prépare la seconde partie de cet article, avec les mises en œuvre de ces colorants, comme l’Urucum, la racine d’Orcannette..etc
Merci beaucoup pour ton article, c’est très intéressant et très bien expliqué !
Merci bcp ! Je prépare la partie 2..
Mais lister les possibilités de coloration et la mise en œuvre de chaque colorant est long..
J’espère qu’elle te plaira autant !
ma dernière fabrication : savons au karité j’ai ajouté de l’argile violette diluée dans huile je pensais avoir du rose j’ai eu un beige beurk !! les surprises de la soude !!
Aïe les pigments ne sont donc pas si stables que ça ?!
Il faut dire que ça dépend tellement du reste des ingrédients !
Et de leur réaction à eux à la soude..
Effectivement les surprises sont nombreuses !
Susan Miller dit que finalement elle laisse souvent « faire la nature » plutôt que de chercher à colorer ses savons précisément.. Et attend la surprise !
Peut-être une solution 🙂